Les Retourneurs de pierre
En lisant une courte bio de Baudelaire : Baudelaire clandestin de lui-même (beau titre, non ? Je mets les références à la fin de ce billet), je suis tombée dès les premières pages sur une expression qui m’a beaucoup plu. L’auteur parle du petit Charles enfant & de son père François comme des “retourneurs de pierres” & de “leur aptitude à la pensée divergente”. Dans les grandes lignes, le père de Baudelaire était un artiste & il avait donné le goût des arts à son fils. Nous connaissons tous la suite, des poèmes qui se lisent comme des tableaux & ses magnifiques “Ecrits esthétiques” dans lesquels on replonge avec délices.
Alors, je me suis demandée que serait la vie sans retourneurs de pierres? Sans ces âmes qui font valser les certitudes pour nous faire avancer? Sans ces théoriciens, débatteurs & consorts qui font vriller les discours pour essayer d’éclairer autrement une idée, un pan de la vie? Les retourneurs de pierre sont aussi d’ordre privé, j’en ai rencontrés quelques fois dans ma vie, je crois bien que je peux les appeler ainsi. Certains sont artistes, d’autres ont été des lumières sur le bord de ma route à l’heure des grands choix, des grandes décisions. J’aime décidément bien cette image, qui se filerait bien dans la métaphore, puisqu’ils retournent les pavés de la vie & nous aident à prendre de nouvelles directions.
Après, je pense aussi qu’il faut se faire confiance à soi-même en temps de retourneur de pierres, que chacun peut avoir ce potentiel de remise en cause &, qui sait? , de fibre artistique, ne pas se tromper sur les faux tailleurs de pierre qui veulent modeler leur âme à leur image...
Candides considérations matinales qui reflètent pourtant les succès & les errements d’une vie mais, j’aime bien quand, parfois, on m’accompagne quand je retourne les pierres de mon jardin...
Florence
Isabelle Viéville Degeorges, Baudelaire, clandestin de lui-même, Editions Page après page, 2004